Et...
Chers Amis...
Ami Richard, comme il est curieux que tu nous parles de ce conte
philosophique, métaphysique et simplement humaniste que j'ai lu très
récemment et dont j'avais envie de parler ici, "un de ces jours"...
Éric-Emmanuel Schmitt, son talenteux auteur, est un
juif devenu
chrétien après avoir été...
agnostique...
Pas de quoi vous hérisser d'orgueil, mes amis chrétiens !
Mais un intéressant parcours spirituel, évidemment.
J'avais donc envie de vous en livrer quelques bribes et voilà que tu m'y invites, cher Richard.
Or donc, Oscar est un enfant atteint d'une maladie incurable (leucémie).
Il va mourir et, sur le chemin qui le mène à cette mort annoncée, il va
être accompagné par une "vieille dame indigne", Mamie-Rose, qui va lui
suggérer d'écrire des lettres à Dieu, histoire de lui dire tout ce
qu'il a sur le coeur et sur l'âme et, peut-être, de le rencontrer.
Au début du livre (très court), il ne lui reste que douze jours à vivre
et Mamie-Rose lui explique que chacun de ces jours comptés doit être
vécu comme une tranche de vie de l'homme qu'il aurait pu être s'il
n'avait été condamné par cette saleté de maladie.
Il est donc très vieux quand la mort vient le cueillir.
Ce conte peut faire l'objet de certaines critiques (si cela vous
intéresse, je vous les proposerai car l'admiration béate n'aide pas
forcément à réfléchir) mais il reste que c'est un conte très beau et
très émouvant.
À vrai dire, il faudrait être un monstre froid pour ne pas être ému... (là est l'ennui...).
Et puisque, sans l'avoir prémédité, Richard m'y encourage, je vous
livrerai quelques unes des lettres que Oscar a écrites à Dieu.
En voici une.
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Cher Dieu,
Merci d’être venu.
T’as choisi pile ton moment parce que j’allais pas bien.
Peut-être que tu étais vexé à cause de ma lettre d’hier…
Quand je me suis réveillé, j’ai songé que j’avais quatre-vingt-dix ans
et j’ai tourné la tête vers la fenêtre pour regarder la neige.
Et là, j’ai deviné que tu venais.
C’était le matin.
J’étais seul sur la Terre.
Il était tellement tôt que les oiseaux dormaient encore, que même
l’infirmière de nuit, Madame Ducru, avait dû piquer un roupillon, et
toi tu essayais de fabriquer l’aube.
Tu avais du mal mais tu insistais.
Le ciel pâlissait.
Tu gonflais les airs de blanc, de gris, de bleu, tu repoussais la nuit, tu ravivais le monde.
Tu n’arrêtais pas.
C’est là que j’ai compris la différence entre toi et nous : tu es le mec infatigable !
Celui qui ne se lasse pas.
Toujours au travail.
Et voilà du jour !
Et voilà de la nuit !
Et voilà le printemps !
Et voilà l’hiver !
Et voilà Peggy Blue !
Et voilà Oscar !
Et voilà Mamie-Rose !
Quelle santé !
J’ai compris que tu étais là.
Que tu me disais ton secret : regarde chaque jour du monde comme si c’était la première fois.
Alors, j’ai suivi ton conseil et je me suis appliqué.
La première fois.
Je contemplais la lumière, les couleurs, les arbres, les oiseaux, les animaux.
Je sentais l’air passer dans mes narines et me faire respirer.
J’entendais les voix qui montaient dans le couloir comme dans la voûte d’une cathédrale.
Je me trouvais vivant.
Je frissonnais de pure joie.
Le bonheur d’exister.
J’étais émerveillé.
Merci, Dieu, d’avoir fait ça pour moi.
J’avais l’impression que tu me prenais par la main et que tu m’emmenais au coeur du mystère contempler le mystère.
Merci.
À demain, bisous.
Oscar.
P.-S. Mon vœu : est-ce que tu peux refaire le coup de la première fois à mes parents ?
Mamie-Rose, je crois qu’elle connaît déjà.
Et puis Peggy aussi, si tu as le temps…
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Si vous le voulez, je vous donnerai d'autres lettres d'Oscar à Dieu, dans le désordre...
Mais à vrai dire, la quintessence du conte est dans ce "post-scriptum"
de la lettre que Maie-Rose écrit à Dieu après la mort d'Oscar.
"Cher Dieu,
Le petit garçon est mort.
(...)
P.-S. Les trois derniers jours, Oscar avait posé une pancarte sur sa table de chevet.
Je crois que cela te concerne.
Il y avait écrit : "
Seul Dieu a le droit de me réveiller".
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Amitiés.
Véronique